Et nos jeunes dans tout ça : que disent-ils ?

Voici une conversation autour des attentats commis récemment en France entre des jeunes du groupe secondaire de notre école de devoirs, Jessica et moi-même :

- Comment avez-vous été mis au courant de la situation ?

- A la télé, sur Facebook, Instagram, en fait principalement à la télé et sur les réseaux sociaux.

- Est-ce que vous avez directement compris ce qu’il se passait ?

- Oui, il y a eu une tuerie, 2 personnes en ont tué 12 autres. Ce sont des djihadistes et ils auraient laissé exprès leur carte d’identité pour revendiquer l’attentat.

- En effet, c’est une hypothèse qui a été émise

- Et avant ces faits, connaissiez-vous Charlie Hebdo ?

La moitié des jeunes connaissait déjà, un jeune a dit que c’était un journal de raciste, on lui demande si le fait de rigoler de tout est-ce que cela veut vraiment dire qu’on est raciste, il dit non mais que ce sont des images qui blessent et que c’est de la provocation. Les autres disent non, ils ne sont pas racistes, c’est un journal satirique, ils font cela au nom de la liberté d’expression mais ils exagèrent quand même parfois.

Un jeune rajoute : « Il faut un certain niveau intellectuel pour comprendre ces images, ces caricatures, au premier regard c’est choquant, ça peut révolter mais il faut analyser le message derrière. »

Jessica ajoute, c’est cela la caricature, si t’as un gros nez ben il va être dessiné encore 10 fois plus gros, c’est de l’exagération.

Je leur demande s’ils ont des craintes :

- Oui, ils ont salis notre religion ces terroristes, on a peur car certaines personnes font des confusions entre musulmans et terroristes, l’Islam c’est une religion qui prône la paix, une religion de tolérance, si tu tues c’est que tu n’es pas musulman, ils ont leur propre religion ces terroristes.

- Donc vous avez peur de vague de racisme, d’islamophobie, c’est ça ?

- Oui, on a peur que Marine Le Pen devienne présidente, que l’extrême droite gagne du pouvoir.

- Et vous pensez quoi du slogan je suis Charlie ?

- Nous ne sommes pas Charlie car cela voudrait dire qu’on accepte qu’il se moque de la religion.

Une jeune dit : « Je ne suis pas Charlie ni Kouachi, ni personne d’autre. »  

Les jeunes avaient pas mal de connaissance et maitrisaient assez bien le sujet, comme par exemple qu’avant le journal s’appelait Hara-Kiri, etc. Je leur demande comment ils savent tout cela, est –ce qu’ils en ont parlé à l’école, est-ce qu’ils se sont renseignés ?

Ils en ont beaucoup parlé à l’école, je leur demande si à l’école il y a eu une minute de silence, non, chez aucun des jeunes.

Un jeune réagit : « Je ne comprends pas pourquoi pour 12 morts on fait une minute de silence alors que plein de gens sont en guerre, meurent tous les jours. »

En tout cas tous les jeunes sont contre ces actes de terrorisme même s’ils ne sont pas d’accord avec les caricatures, ils pensent tous qu’ils ne méritaient pas cela que c’est une réaction exagérée.

Une jeune intervient en disant oui et pourquoi Dieudonné ? Avant même que je n’intervienne un jeune lui explique : « Dieudonné lui ce n’est pas la même chose, il incite à la haine » J’ajoute aussi que ce qu’il dit est négationniste, c’est-à-dire il nie que la Shoah a existé, il nie un fait historique et grave qui s’est déroulé et c’est ça qui lui est reproché. Il a perdu mais aussi gagné certains procès. Ils sont conscients qu’il y a eu également plusieurs procès contre Charlie Hebdo et qu’ils ne les ont pas tous gagnés.

Mais ils se disent que ces caricatures provoquent quand même la haine, il y a des répercussions, des blessés et morts collatéraux.

En effet, c’est pourquoi c’est très compliqué de savoir ce qui est accepté, toléré ou pas, au nom de la liberté d’expression et surtout, quand cela concerne l’humour. A chaque procès, c’est du cas par cas et la décision finale revient au juge, qui doit trancher.

En tous cas, lorsqu’il se passe de tels évènements, il est important d’en parler avec les jeunes qui sont les adultes de demain, je les remercie ainsi que Jessica pour cet échange très intéressant.

Coralie,

Assistante sociale