Qu’est-ce qu’un SPEP ?

31 Octobre 2014

 

Aujourd’hui, je souhaite vous parler d’une institution particulière du secteur de l’Aide à la jeunesse, les SPEP, service de prestations éducatives et philanthropiques. Ce type d’institutions est particulier dans le sens où un SPEP intervient à un moment précis du parcours de certains jeunes. En effet, les SPEP ne s’adressent qu’aux jeunes ayant commis des faits qualifiés d’« infractions » et ont pour mission d’apporter une réponse éducative à la délinquance juvénile en organisant des prestations éducatives et philanthropiques[1]. Les SPEP sont des institutions privées constituées sous forme d’ASBL. Elles sont financées par l’Aide à la jeunesse et sont sous mandat du Tribunal de la jeunesse.

Cependant, avant de définir plus en avant les fonctions d’un SPEP, je vous propose de revenir sur leur histoire en s’arrêtant un instant sur leur apparition au sein du paysage institutionnel de l’Aide à la jeunesse. C’est par l’introduction, dans la loi du 8 avril 1965,  des prestations d’intérêt général comme alternative au placement d’un jeune ayant commis un fait qualifié d’« infraction », qu’apparait pour la première fois cette notion à l’attention des mineurs d’âge. Il faudra pourtant attendre les années 80 et même 90 pour que dans certains arrondissements judiciaires les magistrats mettent en pratique cette disposition[2].

Les magistrats en charge de juger et de sanctionner les jeunes ayant commis des faits qualifiés d’ «infractions» ont, parmi les différentes mesures qu’ils peuvent prendre à l’égard d’un jeune, la possibilité d’en prendre une de «surveillance». C’est sous cette mesure dite de «surveillance » qu’apparait la possibilité pour le jeune d’accomplir une prestation éducative ou philanthropique. C’est là qu’entre en jeu le SPEP. En effet, ce dernier, une fois mandaté par un juge de la jeunesse, par ordonnance ou par jugement, intervient comme accessoire de cette mesure afin de maintenir le jeune dans son milieu de vie et d’offrir une réponse rapide et claire à l’acte délinquant posé par le mineur[3].

C’est en organisant la prestation d’intérêt général, qui prend le plus souvent la forme d’un travail bénévole de la part du jeune auprès d’un organisme d’intérêt public, que le SPEP réalise une partie de son travail. Le choix de la prestation est construit en collaboration avec le jeune et prend en considération ses motivations, ses capacités ainsi que son milieu de vie. Ces prestations ne dépassent pas 30 heures lorsqu’elles sont actées par une ordonnance et 150 heures lorsque c’est le tribunal de la jeunesse qui les préconise. Le SPEP peut aussi intervenir afin d’offrir la possibilité d’une médiation auteur-victime, lorsque le jeune l’accepte et que la victime le souhaite[4]. En effet, la médiation est un processus volontaire pour lequel le médiateur doit s’assurer tout le long du processus de l’adhésion sans réserve de toutes les parties concernées.

Cette mesure de « surveillance »[5] vise à répondre à plusieurs enjeux : social, judiciaire et au niveau du jeune. Il y a un enjeu social, car par le biais d’une mobilisation de la société dans la gestion de la délinquance, celle-ci devient active dans l’accueil et la réinsertion sociale du jeune. On peut aussi y voir un enjeu judiciaire, car, grâce au recentrage sur le délit et les tensions sociales  occasionnées par le jeune, cela introduit une dimension sanctionnelle, mais aussi réparatrice. Cette orientation judiciaire réparatrice est souvent perçue par le jeune comme une réponse légitime et crédible, car elle répond à un double besoin : le rappel à la loi et la possibilité pour le jeune de réparer son dommage afin de ne pas rester « celui qui a fauté ». On peut conclure en disant qu’il y a aussi un enjeu au niveau du jeune, car par l’accomplissement de sa prestation, il se rend compte des contraintes liées à celle-ci, ce qui l’enjoint à se responsabiliser face aux conséquences de ses actes. Cette alternative au placement du jeune ayant commis un fait qualifié infraction permet au jeune d’éviter les conséquences directes d’un placement qui peuvent êtres multiples : exclusions, marginalisations, culpabilisations, stigmatisations,  etc.

Les SPEP sont donc des outils aux mains de de la justice des mineurs afin de les responsabiliser sans les exclure de la société civile et en favorisant leur réinsertion sociale. Sur l’arrondissement bruxellois, on compte quatre SPEP : Le Radian, MAGIC, Escale et Affiliations. Comme dit précédemment elles sont toutes les quatre des ASBL et sont toujours mandatées par un juge lorsqu’elles agissent auprès d’un jeune. Dès le premier janvier 2015, les SPEP changeront d’appellation et deviendront des SARE, service d’actions restauratrices et éducatives. Avec cela d’autres missions leur seront confiées comme la possibilité pour le jeune de suivre une formation de sensibilisation.

Si cet  article vous a intéressé et que vous souhaitez aller plus loin, n’hésitez pas à vous reporter aux sources de cet article ou à venir à la permanence psychosociale d’Inser’Action AMO pour poser vos questions.

Naïm Lfahem

Assistant social

 

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Justice