Le soir du 6 novembre 2014, la Strada, Centre d’appui au secteur bruxellois d’aide aux sans-abri, a réalisé un dénombrement des personnes sans abri, sans logement et en logement inadéquat en Région de Bruxelles-Capitale. Ce dénombrement a été effectué sur les 19 communes bruxelloises ainsi qu’à l’...

La vie dans la tour HBM

31 Mai 2015

 

J’ai eu le plaisir de converser avec plusieurs habitants de la tour HBM, j’ai questionné la pratique du vivre ensemble dans un appartement de logements sociaux de 8 étages. Quels sont les aspects positifs, les négatifs, qu’est-ce qui pourrait être fait pour améliorer certaines choses ?

Je tiens à préciser que ces dires sont propres à quelques habitants et ne représentent peut-être pas ce que pense la majorité.

En ce qui concerne les travaux à réaliser ou lorsqu’il y a des problèmes et qu’il faut faire appel à des ouvriers, cela peut prendre du temps, il faut parfois fortement insister, il y a un manque d’ouvriers, mais les habitants comprennent que pour un propriétaire de logements sociaux cela peut-être parfois difficile, car il y a des personnes qui ne paient pas leur loyer, il y a du retard dans les rentrées d’argent , mais bon il ne faut pas que les personnes qui paient en temps et en heure soient  lésées.  Il y a une assistante sociale aux HBM, qui est une personne ressource, qui est vraiment neutre et qui est à l’écoute des locataires.

En ce qui concerne les rapports entre voisins, cela va mieux, il y a de la solidarité : par exemple, dans l’immeuble, il y a des grands-parents qui viennent de perdre leur petite-fille, cela touche tout le monde, lorsqu’on croise une personne âgée, on lui porte ses sacs de courses, surtout quand l’ascenseur est en panne. Les personnes présentes, interviewées, se retrouvent l’une chez l’autre pour boire un café ensemble, il y a un côté familial, elles savent vers qui se tourner lorsqu’elles ont besoin de quelque chose.

Par exemple, lorsqu’il y a des soucis, et qu’il faut contacter les HBM, il y a de la débrouillardise, les personnes savent vers qui se tourner pour contacter les HBM, certains osent plus, et arrivent à se faire entendre plus facilement.

Bien évidemment, il y a quelques difficultés, avec certaines personnes cela ne passe pas, on ne peut pas s’entendre avec tout le monde. Par exemple, il y a un souci chez certains d’odeurs nauséabondes, par exemple liées à la nourriture, et sur des points comme cela, c’est difficile de communiquer.  Un des problèmes qui compliquent les relations entre voisins et qui peut créer des tensions c’est qu’il n’y a pas d’évacuation d’eau sur la terrasse, du coup lorsque quelqu’un nettoie sa terrasse, ceux d’en dessous ramassent tout. Cela est arrivé d’avoir des taches de Javel sur des habits qui pendent, ou des habits qui sèchent qui se retrouvent salis et mouillés etc.

Avec tout le monde, on se dit bonjour, le minimum de politesse, d’autres avec qui on se retrouve.

Au niveau sécurité, ça va, il n’y a pas de peur particulière, par contre une des habitantes me dit qu’elle ferme la porte à clef, tandis qu’avant elle ne le faisait pas. Ils seront quand même plus rassurés lorsqu’il n’y aura plus d’échafaudages, car il y a  déjà eu des jeunes qui grimpent et cela peut faciliter les vols.

Par contre au niveau de la collaboration avec la police, cela reste compliqué. A la base, il y avait un contact, un commissaire en lien direct avec HBM, mais très difficile à contacter, du coup, il fallait passer par le 101 directement, qui parfois ne sont pas discrets et viennent sonner chez la personne en disant «  c’est vous qui avez appelé ? », du coup, il y a une tendance à se taire s’il se passe quelque chose.

Par contre, il y a des enfants extérieurs qui viennent trainer en bas et s’amusent à ouvrir les poubelles et répandre les déchets dans les pyramides.

Pour le moment, avec les travaux, l’espace dehors est réduit. Ils pensaient qu’avec l’arrivée des éducateurs de rue, cela calmerait les choses, mais quand les jeunes sont accompagnés des éducateurs ils sont calmes, mais lorsqu’ils ne sont pas présents, cela est différent.

Une maman a des enfants plutôt casaniers, l’autre ne veut pas que ses enfants sortent dans le quartier, en dehors, il n’y a pas de souci, elle n’a pas envie de les enfermer car s’ils restent tout le temps à l’intérieur, ce serait tablette, PlayStation, etc.

Je pose la question du concierge : est-ce qu’il y a une différence depuis qu’il n’y en a plus ?

S’ils voulaient réinstaurer ce système là, ce serait les habitants qui devraient payer le salaire apparemment, ce qu’ils ne veulent pas. Une habitante me dit que cela est mieux maintenant, l’ancienne concierge ne servait à rien, elle a été virée et depuis il n’y en a plus eu.

Je leur demande si elles ont un intérêt pour l’organisation d’une fête entre voisins. Oui elles, elles aiment cela, se retrouver etc. Avant, elles sortaient en bas avec les enfants, c’était chouette, elles s’asseyaient, discutaient et les enfants jouaient, mangeaient une glace. Je demande pourquoi cela ne se fait plus ? Là maintenant avec les travaux, cela n’est plus possible de toute manière, il y a aussi des enfants qui s’amusaient à jeter des copeaux de bois. Une ne sait pas vraiment pourquoi cela ne se fait plus. Une autre parle du manque de temps, de la routine: chercher les enfants à l’école, devoirs, manger, dodo.

Je leur demande comment elles sont arrivées ici, dans la tour HBM ?

Une, habitait déjà Saint-Josse mais dans le privé et elle a eu de la chance, elle a fait sa demande et 3 mois après, elle a emménagé ici.

Une autre habitait également Saint-Josse. Elle avait des problèmes de violences conjugales, l’agent de quartier a été mis au courant ainsi que le bourgmestre de l’époque, à un moment, elle a dû être hospitalisée à cause de cette violence. Le bourgmestre lui a demandé ce qu’il pouvait faire pour l’aider, elle lui a dit qu’elle aimerait trouver un appartement. Le bourgmestre a appelé les HBM et a demandé d’être prévenu dès qu’un appartement se libérait et que cela serait pour Mme. Elle a eu droit à un petit appartement. Grâce au travail, elle a pu mettre de l’argent de côté et aménagé l’appartement. Une fois qu’elle a eu son premier enfant, elle a fait une demande d’un autre appartement et elle est arrivée ici.

En faisant du porte-à-porte afin de rappeler aux habitants l’invitation à l’assemblée générale dans le cadre du groupe de travail HBM, j’ai rencontré un voisin qui m’a dit que cela ne servait pas à grand-chose de se réunir et parler car rien ne change mais qu’il faudrait faire du porte à porte afin de sensibiliser les personnes au respect des lieux communs, de ne pas laisser les enfants dégrader car les communs ne sont pas très accueillants dans l’état dans lequel ils sont.

Je remercie ces habitants pour ce témoignage qui nous éclaire sur le vivre ensemble, ses joies et ses difficultés.

Coralie

Assistante sociale

Thèmatique(s)
Logement