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Témoignage

30 Avril 2015

 

X est un jeune qui va sur ses 25 ans. Il tenait à témoigner et à nous faire part de son parcours, de sa jeunesse difficile, parcours malheureusement étroitement lié à la justice. Il y est toujours lié, en attente que ça prenne fin et qu’il puisse se réinsérer dans la société.

 
X nous raconte :
 
J’ai eu un parcours de jeunesse difficile dès mes 14 ans. J’ai changé d’école et j’ai rencontré de nouveaux camarades, dont un plus particulièrement. Avec lui j’ai commencé par des petits vols : comme des vélos près de l’école par exemple. Ce garçon, c’était son quotidien, j’ai été entrainé là­dedans. Je voulais avoir une certaine image, gagner du respect. Cela a commencé comme ça et s'est terminé par un vol avec violence qui a débuté par un simple regard de travers. C’est allé plus loin, on a donné des coups et on en a profité pour prendre ses affaires. On a eu un contrôle de police, on a été identifié par la victime et privé de liberté. A 14 ans, c’était ma première nuit au cachot.
 
Coralie : Quel souvenir en gardes-­tu ?
 
A ce moment-­là, je ne trouvais pas ça si grave. Le lendemain, se fut ma 1ère rencontre avec un juge de la jeunesse. Je n’avais pas d’antécédent contrairement à mon camarade, j’ai été libéré avec le conseil de reprendre une vie normale. Mon camarade a été en IPPJ.Cela n’était pas encore suffisant pour m’arrêter car 2 jours après j’ai participé à un vol à l’étalage dans un Colruyt, on a essayé de voler des jeux avec des autres amis de l’école. On s’est fait prendre, j’ai passé quelques heures au cachot puis j’ai été escorté par la police jusqu’à la maison.Le lendemain, je suis passé voir des camarades de mon ancienne école et on a attaqué d’autres jeunes de l’école. Il y en a un qui a reçu des brulures de cigarettes. Sur le moment­ même il n’y a rien eu, mais le jeune a porté plainte. Quelques mois après, j’allais sur mes 15 ans et j’ai été convoqué au tribunal de la jeunesse, le juge aété assez compréhensible, le verdict : 40 h de peine de travail.
 
Coralie : Est­-ce que cela t’as fait peur ou prendre conscience de quelque chose ?
 
La peine de travail m’a fait comprendre, fallait que j’arrête ma délinquance, j’ai été calme tout un temps. Avec le recul, je me rends compte que j’avais un problème d’influences, je suis quelqu’un d’influençable, cela ne me faisait rien, je n’avais pas peur de la justice, je ne connaissais pas vraiment le système judiciaire, je ne réalisais pas dans quoi j’étais. La peine de travail m’a fait prendre conscience. J’ai eu l’envie par moi­même, et j’ai été aidé par le CEMôme où on était suivi depuis qu’on était petit, à l’époque où on habitait Saint­Gilles. Avecleur aide, j’ai changé d’école.Mon but était de changer de fréquentations. Ça m’a aidé au début. Ce qui a rouvert mon dossier au tribunal était dû aussi à la situation dans laquelle je me trouvais : j’avais des problèmes avec ma scolarité, j’ai perduma motivation à cause des redoublements, je me retrouvais en classe avec des plus jeunes, j’ai décroché, je brossais.
 
Coralie : Sais-­tu si tes redoublements étaient dus à des difficultés ou à ton relâchement ?
 
Franchement c’est une question à laquelle je suis incapable de répondre, même à ce jour.
 
Coralie : Et tes parents dans tout cela, que disaient-­ils ?
 
Ma mère m’a toujours dit de faire attention à mes fréquentations, mais je n’aimais pas qu’on me fasse la morale. J’ai été amené à revoir le Juge de la jeunesse par rapport à mon décrochage, puis j’ai été correct jusque ma majorité. J’étais toujours dans la même école, j’ai eu des nouvelles fréquentations. Et un jour dans un parking à Ottignies, mon rôle était de faire le vigile, pendant qu’eux cassaient les vitres pour voler des GPS.
 
Coralie : Est­-ce que tu étais conscient que ton passage à ta majorité avait des répercussions, que tu encourrais des peines plus lourdes ?
 
Franchement, non, je n’en étais pas conscient.Je n’avais rien commis moi mais je faisais le guet. On a été embarqué, j’ai passé la nuit au cachot, je suis passé devant le procureur du roi pour la première fois. Comme je n’avais pas d’antécédents en tant que majeur et que j’étais encore aux études, du coup, il a été un peu plus clément avec moi, il m’a prévenu que je serai convoqué plus tard concernant le dédommagement aux victimes.C’est à partir de là, que ma délinquance a recommencé. Comme je ne jouais pas à chaque fois pas un grand rôle,je me sentais un peu couvert. En septembre 2008, j’ai encore été recalée dans mes études alors que j’avais le sentiment de m’être donné à fond donc, j’ai choisi de nier le chemin de l’école.J’ai retrouvé d’anciennes connaissances de l’école, c’était la rencontre avec un monde d’autres jeunes, ceux qui ne suivaient pas de scolarité.
 
Coralie : Je vois que tu fais un lien avec la scolarité, tu penses que c’est un moyen de tenir ?
 
Oui, cela permet d’avoir un but et d’éviter de faire de grosses bêtises.Ces jeunes, ce sont des jeunes que j’avais connus en primaire, même parfois en maternelle, c’était des retrouvailles et c’était encore des plus gros délinquants que mes camarades d’écoles avec qui j’avais déjà commis des bêtises auparavant.J’ai fait connaissance avec le monde de la nuit, mes potes étaient des arracheurs de sac à main, moi, je ne l’ai fait qu’une seule fois et cela m’a culpabilisé, je leur ai dit que plus jamais je ne ferai cela.
 
Coralie : c’était plus culpabilisant car c’était une attaque directe ?
 
Oui, c’était une femme, elle était au téléphone, je lui ai arraché et j’ai couru, elle m’a couru après mais j’étais plus rapide et tout ça pour avoir 15 euros dans les poches, et ses papiers que j’ai jetés, je n’étais pas fier. Je ne voulais pas attaquer des femmes, cela me rendait mal à l’aise. J’ai dit que je ne voulais plus jamais faire cela.
 
Coralie : Et dans ce groupe, ils ne t’ont rien dit, ils ont accepté ta décision ?
 
Oui, j’étais respecté, ils savaient que j’étais quelqu’un qui ne se laissait pas faire. Ils ont respecté ma décision.Du coup, un autre a proposé quelque chose d’autre : un de ses petits cousins avait subis des attouchements venant d’un homosexuel, donc il a eu l’idée d’attaquer les homosexuels, il avait une haine envers eux.
 
Coralie : C’était vu comme une manière de changer le profil des victimes ?
 
Oui, il avait cette haine et à l’époque, l’homosexualité était quelque chose de plus tabou, de moins accepté dans la société.On en a attaqué plusieurs dans les buissons dans un parc pour les voler et ce, pendant 1 mois. Puis cela a dégénéré, celui qui avait la haine a ramené beaucoup d’amis que je ne connaissais pas, on était 16 en tout, cela a été bien pire, un gars a reçu un coup de couteau sous prétexte qu’il ne voulait pas lâcher son sac de marque.2 se sont fait prendre, un s’est tu, l’autre a balancé. C’était ma 1ère incarcération, j’avais 19 ans, cela a duré 9 mois.
 
Coralie : Et comment as­tu vécu cela ? Cela devait être difficile, le monde carcéral c’est quelque chose de dur, les conditions de détention ne sont pas facile.
 
Au début oui, puis je m’y suis habitué, on s’y fait.
 
Coralie : Tu travaillais, en atelier ou quoi ?
 
Oui, à un moment donné puis après plus.En prison j’ai fait de mauvaises rencontres, ça te transforme.
 
Coralie : Et à ta sortie comment te sentais­-tu ?
 
Une partie de moi était détruite.
 
Coralie : tu ne te sentais pas soulagé ou quoi ?
 
Non, même pas, et j’étais malpsychologiquement. J’aicommencé à boire et j’étaisdevenu nerveux. J’ai récidivéaprès un an demi, toujours pourle même genre de faits.Ma 2ème incarcération c’était à22 ans, j’ai fait 5 mois à caused’une histoire à Liège, j’ai suivides potes qui sortaient, je ne dispas que j’ai fait quelque chosemais j’étais présent. C’est surtoutcela mon problème, présent avecdes mauvaises personnes qui fontdes mauvaises choses.Ma 3ème fois à 23 ans : 6 mois àcause d’une bagarre.Là je suis toujours enconditionnelle et j’ai eu une lourde peine de travail : 350 h
 
Coralie : Comment vois­tu les choses maintenant, avec le recul ? Un conseil à donner?
 
Je regrette fortement, le passé te poursuit toujours, si j’avais un conseil pour les jeunes : faites très attention à vos fréquentations et aux mauvaises influences. Le passé te poursuit, et après c’est difficile pour tout, trouver du travail, etc. cela casse ta vie.
 
Coralie : Et si tu pouvais retourner en arrière ?
 
J’aurais aimé ne pas connaitre les mauvaises personnes, trouver un autre milieu, et plus m’accrocher aux études. Maintenant mon quotidien c’est courir de tous les côtés, entre les différents services.
 
Coralie : Est­-ce que tu trouves de l’aide, du soutien ?
 
Je me sens soutenu par l’asbl Après concernant mon insertion socioprofessionnelle, aussi par Inser’action, ce n’est pas loin et je peux venir facilement trouver de l’aide et être écouté. Mon assistant de justice aussi, est là pour m’aider.
 
Coralie : Quels sont tes souhaits, espoirs ? Où te vois-­tu dans 5 ou 10 ans ?
 
Je veux terminer ma peine de travail, même si j’ai bien aimé, je fais mes heures dans un restaurant social, mais je préfère continuer à y aller pour faire du bénévolat, ne pas être là par obligation pour mes heures. Je ne veux plus être lié à la justice, ils m’ont dit qu’une fois que les victimes étaient indemnisées et si je ne commettais plus rien mon dossier judiciaire serait effacé complètement.Et dans 5 ou 10 ans ? C’est trop tôt pour le dire, j’aimerais trouver un poste dans la sécurité.
 
Coralie : Et te retrouver de l’autre côté dans un sens ?Oui, c’est vrai mais je ne veux pas être policier, pas contrôler, fouiller ou menotter des gens.
 
Coralie : As-­tu peur de basculer à nouveau ?Franchement, l’avenir me fait un peu peur, tu sais jamais comment cela peut finir.
 
Coralie : Comment vois­tu l'avenir?
 
J’ai fait la première étape de la formation d‘animateur en centre de vacances via le Cemea, je suis actuellement une formation en anglais et je suis en train de m’informer concernant l’engagement dans un service citoyen,cela m’intéresse c’est un moyen de s’insérer dans la société et de faire le bien.
 
Je te remercie pour ce témoignage et te souhaite une bonne continuation et de la réussite pour tout ce que tu entreprendras, à bientôt.
 
Coralie,
Assistante sociale
Thèmatique(s)
AdolescenceJustice