Etats des lieux des mères adolescentes en Belgique francophone

31 Décembre 2013

Le mois dernier je vous ai parlé des mères qui élèvent seules leur enfant ; des femmes qui se battent au quotidien et courageusement. Ce mois-ci, je vais me pencher sur les différents facteurs qui interviennent dans une grossesse chez les adolescentes.

 

J’ai pris comme base l’étude réalisée par Aujoulat Isabelle, une étude de l’UCL menée par l’Unité d’Education pour la Santé (2007).

Etats des lieux des mères adolescentes en Belgique. Combien sont-elles ? Qui sont-elles ?

D’après les chiffres de l’One (Office National de l’Enfance), en Communauté française (2006) la grossesse à l’adolescence est liée à trois causes et expliquerait un nombre plus important de grossesse à l’adolescence:

  • La localisation : plus de mères célibataires en région wallonne que dans toute autre province belge ;
  • La nationalité : 80 % des filles sont de nationalité belge. Cependant pour Bruxelles la majorité ont des origines africaines.
  • Les conditions de vie précaires.

 

La majorité des jeunes mamans vivent en couple (58.5%), 33,9 % chez leurs parents et 3,9% en maison maternelle.

 

La survenue d’une grossesse est souvent plus fréquente dans les milieux de vie défavorisés, et dans les quartiers où les conditions de vie sont difficiles. Les futures mamans ont une vision d’avenir scolaire et professionnel peu engageante.

 

Être une mère adolescente, un choix ou une contrainte ?

 

Pour certains spécialistes le vécu de la grossesse et ensuite l’éducation d’un enfant, sont pour ces mamans une manière de réparer leur propre vécu. Elles trouvent dans le désir d’une grossesse une manière de combler un manque affectif.

 

L’analyse du témoignage de 477 adolescentes montre cependant que tous les milieux sont concernés par des grossesses précoces.

 

Cette étude fait aussi part du sentiment de ces jeunes filles qui, dès l’annonce de leur grossesse, subissent un sentiment de rejet (familial, scolaire, …).

 

L’information affective et sexuelle encore taboue…

Ce rapport pointe également l’importance de l’éducation sexuelle. Lever les tabous sur la sexualité et la contraception n’est pas évident et des efforts sont dès lors encore à fournir. Il s’agit surtout de faire réfléchir les jeunes, filles et garçons afin qu’ils aient un comportement responsable. L’éducation affective et sexuelle peut passer par l’école, le corps médical, la famille, les pairs et les médias.

Les discussions autour de ces questions au sein de la sphère familiale restent difficiles et les jeunes filles ayant participé à l’étude le disent très bien. Cependant, elles regrettent le rôle important des parents, qui est souvent faible dans ce domaine.

 

Les mamans adolescentes, des mamans comme les autres.

Cette étude montre, malgré  leur jeune âge, à quel point les jeunes mamans se sentent responsables et prennent du plaisir à être en contact avec leur enfant. Le lien d’attachement peut être très puissant. Une maman adolescente peut donc très bien être une maman adéquate.

Les experts préconisent néanmoins un bon suivi, afin de renforcer chez ces mamans encore en construction leur capacité à être maman. Les professionnels de l’enfance et de l’éducation jouent donc un rôle de première ligne pour guider les mamans dans leur rôle parental.

Je vous invite maintenant à découvrir le témoignage d’une jeune maman pleine de courage :

 

Tu es une jeune maman, pourquoi souhaites-tu nous faire part de ton histoire?

Je souhaite témoigner car je veux que l’on sache que mon enfant est un enfant différent. Ce n’est pas un rejet qu’il faut avoir. Témoigner me permet aussi de mieux accepter la situation. Mon enfant est trisomique[1] et je me suis dit que ce serait une bonne idée d’en parler à ceux et celles qui ne connaissent pas cette maladie. Ces enfants sont différents, mais malgré cela ce sont des enfants comme les autres. Ils apportent beaucoup d’amour mais demandent également beaucoup de soins et de temps. A travers cette expérience difficile, j’ai compris qu’on peut avoir des moments de faiblesse et qu’il est important dans ces situations d’être bien entouré. C’est vrai que j’ai eu difficile à accepter que mon petit soit trisomique. Pendant la durée de ma grossesse je ne voyais rien, donc tout était normal pour moi et puis on ne le savait pas encore. Je me suis donc fait un film en me disant que mon enfant serait comme les autres, qu’il allait avoir des projets plus tard… Après la naissance, sachant qu’il est trisomique, ça change beaucoup des choses. Mon enfant reste cependant un enfant, un être humain comme tout le monde ; il faut l’accepter comme il est.

 

Le papa a été distant dès la naissance, et ce dès l’annonce de la trisomie. Nous avons eu beaucoup de moments difficiles pendant et après. Au final, cette expérience fait que nous ne nous comprenons plus. Nous sommes perdus, même dans notre propre vie de couple, qui n’en n’est plus vraiment une. Nous sommes très distants pour l’instant. Le papa demande des nouvelles de notre enfant mais nous ne nous voyons que très rarement.

 

Je me suis fait le film d’un enfant idéal mais l’enfant idéal n’existe pas, ça c’est sûr !

 

T’attendais-tu à être maman et qu’est ce que ce nouveau statut a changé pour toi?

Oui, nous avons voulu cet enfant et l’avons désiré et attendu. Mais je me faisais un film. Maintenant c’est plus compliqué. Je me suis fait le film d’un enfant idéal mais l’enfant idéal n’existe pas, ça c’est sûr !

Ca a changé plein de choses dans ma vie quotidienne et pour mon futur aussi. Des projets que j’envisageais et qui ne pourront pas se faire. Je reste cependant positive quoi qu’il arrive. Il ne faut pas que je baisse les bras.

 

Ca fait quoi pour toi d’être maman ?

Je suis contente, je ne regrette pas malgré le handicap et ça reste mon fils. Je l’ai porté neuf mois dans mon ventre et des liens se sont créés pendant tout ce temps. J’ai pu ressentir des sensations nouvelles et différentes à chaque étape. A l’hôpital on m’a proposé des services qui pourraient l’adopter si je le désirais mais j’ai refusé car j’étais déjà attachée à mon enfant.

 

Quelles sont les questions que tu te poses maintenant ?

Comme il est petit je ne peux pas encore constater quels seront les vrais effets de son handicap plus tard. Pour le moment il m’est donc difficile de me poser des questions.

 

Comment as-tu demandé de l’aide en tant que jeune maman?

Une dame d’un service a été présente pour moi durant mon hospitalisation. Ce soutien m’a beaucoup aidé. Cette personne m’a également beaucoup conseillé et m’a remonté le moral.

 

En quoi Inser’Action t’a aidée ?

Inser’action m’a aidée à me remettre les idées en place et à faire des choix. A mener une régularité dans le quotidien, ce qui n’est pas évident. Elle m’a aussi aidée dans les aspects administratifs.

 

Quels sont les conseils que tu voudrais donner à une jeune fille qui pourrait se trouver dans une situation similaire?

Je lui conseillerais de toujours être entourée, de ne jamais rester seule, ni de penser à donner son enfant en adoption. Ce sont des enfants très attachants, malgré les difficultés. Il faut rester positif quoi qu’il arrive, et se dire que tout se passera bien. Il ne faut pas baisser les bras, et être toujours entouré de ses amis, et faire tout le nécessaire pour que l’enfant soit en bonne santé. Un enfant trisomique doit être stimulé dès la naissance.

 

Qu’aimes-tu faire dans la vie ?

J’aime chanter, danser et surtout écrire !

 

Un mot pour clôturer ?

Etre jeune maman n’est pas une erreur. C’est mon réseau artistique qui m’a aidé à rester forte.

 

 

Un grand merci de nous avoir confié un bout de ton histoire… A très vite et n’hésite pas à venir nous raconter la suite.

 

 

 

 

-Seva

Pour la permanence d’Inser’action -




[1] La trisomie 21 (syndrome de Down ou mongolisme) est une anomalie chromosomique congénitale provoquée par la présence d’un chromosome de trop sur la 21ème paire. (Source web : Wikipédia)